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La fin du numerus clausus

11 Octobre 2018

Fini l’écrémage de fin de première année. L’accès aux études de médecine, dentaires, de pharmacie et de sage-femme ne sera plus limité par des quotas, marquant ainsi la suppression du fameux numerus clausus à partir de 2020, comme l’ont annoncé ce mardi Emmanuel Macron et la ministre de la Santé Agnès Buzyn dans le cadre de la présentation du plan santé. Supprimée, aussi, la première année commune en santé (Paces) et son concours redouté.

Par quoi le système existant sera-t-il remplacé ? Les modalités d’accès aux futures études de santé seront discutées avec les acteurs du secteur et « précisées d’ici Noël », a indiqué la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal. « On veut sortir de la situation actuelle » où des jeunes « passent de "lycéen brillant" à "étudiant brillant ayant échoué au concours" », a rappelé la ministre.

Présentant une vaste réforme du système de santé, le président Emmanuel Macronavait confirmé dans la matinée la suppression du numerus clausus, qui limite le nombre d’étudiants admis en 2e année d’études de médecine, sages-femmes, dentaires ou de pharmacie, pour « former plus de médecins ».

La fin de la Paces et du concours

Le numerus clausus, « une absurdité » selon Emmanuel Macron. Soulignant que la première orientation de son plan pour le système de santé est de le « construire autour du patient », qui doit « avoir accès aux soins dont il a besoin », le président a rappelé la nécessité d'« être sûrs qu’on forme bien et suffisamment de médecins ». Ainsi, « dès la rentrée 2020, il n’y aura plus de concours à la fin de la première année », a ajouté le chef de l’Etat. « Chaque année 25.000 étudiants, du jour au lendemain, passent d’excellents lycéens à celui ou celle qui échoue pour la première, la deuxième ou la troisième fois à la première année », a-t-il déploré.

« Mes ministres m’ont proposé une rénovation complète des études de santé et notamment médicales. Le numerus clausus sera donc supprimé pour cesser d’entretenir une rareté artificielle », a expliqué le chef de l’État.

Sur quels critères seront formés les futurs médecins ? Combien seront-ils ? Seule certitude : « Il n’y aura plus de première année (commune en santé, Paces) avec un concours à la fin », a confirmé Frédérique Vidal.

 

Favoriser la diversité des profils et conserver une sélection

Mais il n’y aura pas non plus de « licence en santé qui débouchera sur un master sélectif » car cela repousserait simplement « le goulot d’étranglement » à la fin de trois années d’études, a-t-elle assuré lors de la présentation du plan santé. Selon Frédérique Vidal, il s’agira plutôt de permettre « de diverses façons » l’accès à diverses filières de santé à partir de divers parcours universitaires. « On travaille à la fois avec les organisations étudiantes, les professionnels de santé, les centres de formation, les facultés de médecine, de santé, etc., de façon à définir quelles seront » ces différentes voies d’accès « aux différentes formations », a développé Frédérique Vidal.

En pratique, « ce sera différent pour les formations à bac +3, avec a minima une entrée au niveau de la deuxième année », tandis que l’entrée en médecine pourra intervenir « plus tard ». Autant de « choses qui vont être discutées et précisées d’ici Noël », selon la ministre. A terme, un étudiant en philosophie pourrait donc décider de rejoindre le milieu de la santé pour y traiter les questions d’éthique, tandis que des jeunes ayant démarré dans l’informatique auront beaucoup à apporter à la médecine à travers de « nouveaux métiers », selon les exemples imaginés par la ministre de l’Enseignement supérieur.

 

Pas question pour autant d’ouvrir les vannes. La suppression du numerus clausus se fera sans « renoncement à l’excellence », a précisé le locataire de l’Élysée. Elle permettra « de former plus de médecins avec un mode de sélection rénové et renforcer la dimension qualitative et le niveau de formation des études de santé ».

Des questions en suspens

Une refonte qui réjouit certains tout en soulevant de nombreuses questions. « La suppression du numerus clausus à la fin de la première année commune des études de santé (…) nous semble une bonne chose, si ces études sont revues dans leur intégralité, explique ce mardi dans un communiqué le Dr Marie Brosset, porte-parole de ReAGJIR, le syndicat des jeunes généralistes. Cela n’a de sens que si on augmente les stages en médecine de ville et qu’on repense les débuts d’exercice dans un cadre réfléchi. Il nous paraît indispensable d’associer les jeunes médecins à cette réflexion ». Pour Jean Sibilia, président de la Conférence des doyens des facultés de médecine interrogé mardi par Les Echos?, « l’option prioritaire » serait celle d’un « numerus apertus », avec un nombre minimal de places que les universités pourraient faire varier à la hausse en fonction de leurs capacités et des besoins locaux.

La suppression du numerus clausus n’aura dans tous les cas pas un effet immédiat. Il ne faut pas se « leurrer sur l’efficacité immédiate d’un tel dispositif », a indiqué Emmanuel Macron. « Nous subissons aujourd’hui les conséquences de décisions prises il y a plusieurs décennies. Nos décisions sur le numerus clausus auront un impact symétriquement dans 10 à 15 ans », a-t-il évalué. Mais à quoi ressembleront les études de santé à la rentrée 2020 ? L’augmentation du nombre d’étudiants en santé avec la fin du numerus clausus sera-t-elle accompagnée des moyens humains, financiers et logistiques suffisants pour former cette nouvelle génération de soignants, alors qu’amphithéâtres et CHU sont déjà saturés ? Pour l’heure, ces questions restent en suspens.

A cette annonce, ce sont par ailleurs les actuels étudiants en Paces qui s’interrogent sur les conséquences de la suppression du numerus clausus, alors qu’ils seront les derniers à y être soumis.